Suite à la soirée “littérature espagnole et tapas” organisée hier soir, voici quelques idées pour se plonger dans une littérature riche et pas toujours bien connue. En dehors des classiques,vous y trouverez des suggestions assez personnelles, basées sur mes propres lectures et goûts, mais j’ai essayé de faire une liste suffisamment large pour qu’il y en ait pour tout le monde.
Bien sûr, ce ne sont que des idées, n’hésitez pas à présenter l’une de vos propres lectures. D’ailleurs, je n’y connais rien en science-fiction et en BD espagnoles et pourtant j’en ai souvent entendu du bien… surtout si vous avez des pistes à partager, ce sera avec plaisir !
Les textes sont placés en ordre alphabétique mais j’ai ajouté des étoiles pour indiquer ceux que je préfère (plus il y a d’étoiles, plus je les aime !).
Dans ce premier article sur la littérature espagnole, vous trouverez les romans contemporains, ensuite, dans un prochain poste, vous pourrez découvrir les recueils de nouvelles, puis les romans classiques, le théâtre et la poésie.
Romans contemporains dans la littérature espagnole :
- Javier Cercas, Soldats de Salamine* Une plongée originale dans la mémoire de la Guerre Civile, avec en plus, une réflexion sur la littérature (qu’est-ce qu’un héros ?) et une véritable aventure initiatique pour le narrateur.
- Dulce Chacón, Voix endormies **A partir d’une série de témoignages, l’auteur reconstitue la vie d’un groupe de femmes prisonnières politiques juste après la fin de la Guerre Civile. Un roman au style volontairement oral qui semble parler directement au lecteur pour le plonger dans des vies marquées par l’injustice mais soutenues par un optimisme et une dignité extraordinaires.
- Miguel Delibes, Cinq heures avec Mario*** J’ai une admiration particulière pour ce texte fabuleux : Carmen, restée seule à veiller le corps de son mari Mario, remonte leur vie dans un discours virulent et amère. Pourtant, c’est un portrait humaniste et optimiste de Mario qui se dessine. Un roman magnifique d’un très grand écrivain.
- Miguel Delibes, Le chemin** Les aventures (tendres, cocasses ou tragiques) d’un groupe d’enfants dans un village de Castille au début du XXe siècle. Le héros, Daniel, sait qu’il va devoir quitter le village pour « progresser », aussi saisit-il avec intensité tous les moments qui précèdent son départ, découvrant la force de l’amitié, les premiers émois amoureux. Par son regard se dévoile la réalité du village pour un roman poétique et engagé.
- Almudena Grandes, Le cœur glacé** Véritable saga qui retrace tout le XXe siècle espagnol à travers la vie entrecroisée de deux familles, Le cœur glacé est un texte romanesque qui découvre avec émotion et une pointe de suspense un siècle d’Histoire.
- Carmen Laforet, Rien* Une jeune fille découvre la Barcelone d’après la Guerre Civile. A la fois roman initiatique et parcours dans une Catalogne broyée par le franquisme, Rien a profondément marqué son époque.
- Juan Marsé, Térésa, l’après-midi** Reconnu comme étant l’un des grands romans de la littérature espagnole du XXe siècle, Téresa, l’après-midi, trace un portrait sans concession de la Barcelone des années cinquante. Manolo et Térésa tentent de faire durer leur idylle, mais lui est issu d’un quartier populaire et survit d’expédients tandis qu’elle est l’héritière d’une riche famille aristocratique. Ironie, regard critique, tendresse mêlée de cynisme configurent des personnages qui restent dans les mémoires.
- Eduardo Mendoza, La vérité sur l’affaire Savolta** L’aventure du narrateur nous entraîne dans les méandres du crime et de l’industrie au début du XXe siècle à Barcelone, entre conflit de gangsters, anarchistes, haute société et amours contrariées. Souvent considéré comme le premier roman de la démocratie, c’est un texte clé de la littérature espagnole contemporaine qui bouscule les codes pour mettre en avant le plaisir de la lecture.
- Antonio Muñoz Molina, Pleine lune****L’un de mes romans préférés de mon écrivain préféré. Une fillette a été assassinée et l’enquête piétine. Mais l’assassin est prêt à récidiver et l’ombre d’ETA se profile tandis que l’inspecteur, au gré des rencontres, réapprend à aimer la vie. Le style, les personnages, la vision du monde, le suspense… il ne manque rien et il n’y a rien en trop dans ce roman qui est un grand texte littéraire.
- Antonio Muñoz Molina, Dans la grande nuit des temps*** (un magnifique roman historique dont nous avons déjà eu l’occasion de parler : Sur les limites du roman historique) Que fait un homme mesuré et pacifiste lorsqu’il est pris dans la tourmente de la Guerre Civile ? Tandis qu’Ignacio Abel tente de survivre en conservant son sens moral et son amour pour une touriste américaine, Judith, le lecteur est invité à participer à la fascination de l’auteur pour une époque clé de l’Espagne. Une lecture de la guerre et de l’exil qui nous renvoie aussi un regard critique sur notre monde contemporain.
- Antonio Muñoz Molina, L’hiver à Lisbonne, un narrateur anonyme écoute un ami perdu de vue depuis plusieurs années lui raconter une histoire d’amour impossible, de crime et d’oeuvre d’art disparue. C’est toute l’ambiance des films des années 40 tels que Casablanca ou Le faucon maltais et celle des club de jazz qui reprend vie dans le style somptueux de l’auteur.
- Arturo Pérez Reverte, Le tableau du maître flamand, la reine du sud, le peintre des batailles, Alatriste…** Vous souhaitez des intrigues ciselées qui font travailler intelligence et imagination ? C’est ici. Pérez Reverte a pour maître Dumas, et ses œuvres portent la marque de l’aventure et de l’Histoire. Difficile de choisir mais j’aime particulièrement le tableau du maître flamand qui mêle art, crime et jeux d’échec, la reine du sud, roman sur une reine de la drogue imaginaire qui a eu tellement de succès qu’elle a été prise pour modèle par des capos mexicains, et enfin le peintre des batailles, roman à part sur l’expérience de journaliste de guerre de l’auteur.
- Dolores Redondo, trilogie de la vallée du Batzan (Le gardien invisible, De chair et d’os, Une offrande à la tempête)* Pour découvrir l’intérieur du pays basque, de ses paysages et de ses traditions toujours vivantes, par l’intermédiaire d’intrigues policières. L’importance donnée à la nature en fait des romans policiers très particuliers qui revisitent aussi certains éléments de la mythologie basque.
- Carlos Zafón, L’ombre du vent. L’une des plus grosses ventes de best-sellers espagnols. Je le mets à cause de son succès mais je n’ai pas réussi à le terminer. Peut-être me redonnerez-vous envie de le lire ?
Qu’en pensez-vous? voilà de quoi lire cet été et même après!
N’hésitez pas à nous soumettre vos propres lectures, vos coup de cœurs espagnols, et surtout n’oubliez pas le prochain numéro: roman court et recueil de nouvelles, textes classiques, théâtre et poésie.