L'Echangeoir d'Ecriture

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rythme

A perdre haleine, le rythme dans le récit

Améliorer son texte : travailler le rythme de son récit

Le rythme de son récit : une question primordiale. Personne n’accroche à un texte mal rythmé : il nous ennuie et on l’oublie. Travailler le rythme de son récit, c’est donc se demander comment retenir son lecteur, comment organiser et dire son histoire. Il y a deux façons de travailler le rythme : dans la construction du texte dans le style. Aujourd’hui, voici quelques pistes de construction qui peuvent servir dans n’importe quel texte narratif : romans, nouvelles, novella ou même témoignage et récits de vie. Le rythme et la question du temps dans le récit Le rythme, c’est une question de temps. Or, il faut bien prendre en compte que dans tout texte, il y a deux temps : celui de la chose racontée (l’histoire) et celui mis à la raconter (le récit). Construire le rythme d’un texte, c’est donc créer un jeu entre ces deux temps pour intéresser le lecteur. Scènes, résumés, pauses, ellipses : Pour jouer avec les temps, il faut savoir alterner entre l’écriture de scènes, de résumés, de pauses et d’ellipses. La scène est un texte où le temps du récit est le même que le temps de l’histoire, par exemple dans les dialogues. On a alors l’illusion de vivre l’action dans les personnages. C’est une partie fondamentale du texte, mais il ne faut pas en abuser, au risque de se perdre dans les détails. Il y a ensuite les résumés qui condensent une partie de l’histoire en quelques mots. Au delà de l’effet d’accélération (suspens, tension), cela permet d’avancer dans le texte. Reste à faire attention au style. Sinon, le lecteur aura l’impression qu’on bâcle par paresse ou manque de savoir-faire. A l’inverse, on peut jouer sur les pauses c’est-à-dire des passages où l’histoire n’avance pas : les descriptions, commentaires, digressions… Et pas question de les couper par principe ! Jouer avec le rythme, c’est aussi alterner les moments de tension et de pause, mélanger le contexte, la réflexion et l’action. Enfin, il y a des ellipses, des événements passés sous silence. Parfois elles sont invisibles (toutes ces actions de la vie quotidienne qui ne servent à rien) et donc ultra-nécessaires ! En d’autres occasions, elles créent un effet particulier : de temps perdu, de nostalgie ou encore de mystère. Pensons à tous ces romans policiers qui racontent le crime mais sautent l’avant et l’après pour qu’on ne sache ni les causes ni ce que devient (au début) le criminel. La fréquence de narration : Deuxième élément de la gestion temporelle du rythme : c’est le nombre de fois pour raconter quelque chose. Car oui, il est tout à fait possible de dire plusieurs fois une même chose, tout dépend de ce que vous en découvrez à chaque occurrence ! Ainsi on peut raconter une seule fois un seul événement (c’est le plus classique et le moins risqué). On eut aussi répéter par exemple depuis plusieurs points de vue. C’est plus compliqué mais les effets sont très intéressants en particulier si les différents personnages n’interprètent pas l’action de la même manière. On peut aussi faire l’inverse, raconter en une fois ce qui s’est passé en plusieurs fois, pour faire sentir l’habitude, la routine, l’ennuie… Là encore, c’est l’effet à produire chez le lecteur qui devra guider votre choix. En pratique : comment améliorer le rythme de son récit ? Choisir Tout dépend de ce que vous voulez raconter et de l’effet à produire chez le lecteur. Voulez-vous créer de l’émotion ou de l’angoisse, raconter une vie ou une aventure, explorer une vision du monde, un problème de société, ou donner vie à un lieu ? Demandez-vous aussi qu’elle est la meilleure façon de transmettre cette idée à votre lecteur. Est-ce en accumulant les actions ou en prenant le temps de montrer le passage du temps ? Vérifier Quand vous vous relisez, vérifiez que tout ce que vous avez écrit est nécessaire. Sinon, voyez comment vous pouvez l’enlever. Faites confiance à votre lecteur, il préférera combler les trous (tant qu’il n’y en a pas trop) plutôt qu’avoir l’impression d’être pris pour un idiot. En résumé, la question du rythme est avant tout une question de choix : quoi dire et par quelle technique ? Se préparer La dernière question qui se pose est comment choisir et être sûr de ses choix. A mon avis, il n’y a qu’une seule solution : lire, lire et lire. Lire en cherchant dans les textes que l’aime comment l’auteur fait pour maintenir notre intérêt. Et aussi reprendre les textes qui nous ont ennuyés pour comprendre ce qui a raté et ne pas le reproduire. Ensuite, et bien, il reste à tester, essayer et éventuellement modifier, voir innover ! Dites-vous bien qu’aucun auteur n’y est arrivé du premier coup. Alors, bonne écriture, et bonnes expérimentations !

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Avoir du style: ce que c’est et ce que ce n’est pas (2/2)

           Après avoir déblayé la question du style en définissant ce qu’il n’était pas, il est temps de préciser ce que serait « avoir un style littéraire ». Nous avions noté qu’il s’agissait de s’adapter au sens. Plus en détail, on pourrait lister un certain nombre d’éléments « faisant style » : Quelques outils pour gérer son style. Une question de musicalité :  « Le poème – cette hésitation prolongée entre le son et le sens[1] ». Chaque langue offre suffisamment de choix pour nous permettre de combiner les mots selon leur sens et leur sonorité. On ne peut pas toujours arriver au fameux sifflement créé dans la réplique d’Oreste : « pour qui sont ses serpents qui sifflent sur vos têtes[2] ». Il ne serait d’ailleurs pas judicieux de le rechercher à tout prix. Pourtant, bien choisies, les assonances (répétition d’une voyelle) et les allitérations (répétition d’une consonne) viennent renforcer nos textes, créant selon les choix, douceurs, violence, dureté. Une question de rythme : Rien n’est plus ennuyeux que d’entendre des phrases qui semblent toutes faites sur le même modèle. C’est lancinant, monotone et endormant. Donc, variez. Mélangez du long et du court, des juxtapositions et des subordinations et pourquoi pas, quelques coordinations. Adaptez à ce que vous racontez. Ainsi, n’hésitez pas à chercher différentes bandes-son pour accompagner chaque partie de votre texte. Ensuite, analysez leur rythme, voyez comment vous pouvez vous en inspirer pour combiner vos phrases. Une question d’image : Certes, les figures de style nous renvoient à nos cours de lycée. Il ne faut pas les dédaigner pour autant. Éloignés de l’usage commun, elles donnent l’impression d’un sens nouveau et pourtant naturel. Mais les images peuvent être aussi des assemblages de mots ou d’idées, pas forcément répertoriés comme « figure ». L’important est de déclencher l’émotion esthétique chez votre lecteur, par leur pouvoir de suggestions, pour créer une ambiance, une émotion.  Ainsi, bien employées,  images et figures permettront de glisser plus profondément dans votre histoire, en marquant l’inconscient du lecteur. En exemple, voici le premier texte qui m’a marqué de façon littéraire :   Une vision du monde:  « La singularité d’un « nouvel artiste » qu’il se nomme Renoir ou Morand, est toujours dans les rapports nouveaux qu’il sait établir entre les choses. –Non les choses mais leurs rapports[3]. » En effet, ce qui différencie une anecdote d’une fiction littéraire, c’est ce qu’elle révèle de l’existence. C’est pour cela que de nombreux auteurs ont cherché un mode d’expression qui permette de transmettre leur vision du monde. Lorsque c’est réussi, cela parait naturel. Parfois, il a fallu des années de batailles avec le vocabulaire et la syntaxe pour que l’auteur soit satisfait. Encore une fois, il s’agit d’adaptation. Donc, en vous relisant, réfléchissez. Comment vos choix linguistiques, thématiques et structuraux soutiennent-ils ce que vous voulez exprimer ? L’essence de la langue : Le style littéraire c’est aussi la capacité de dire uniquement le nécessaire. Pour cela, l’expérience compte beaucoup comme l’explique le critique Maurice Edgar Cointreau du processus qui amena Steinbeck à écrire l’un de ces chefs d’œuvre : « La perfection de ce roman très bref vient sans doute du fait qu’au cours des années précédents, John Steinbeck avait conjuré ses démons. Son romantisme débridé avait imprégné Cup of Gold ; son panthéisme s’était tari dans To a God unknown, son humour avait explosé ans Tortilla Flat, et sa mystique libertaire lui avait dicté In Dubious Battle. De ces quatre produits soigneusement décantés, ne restait que la quintessence d’où naquit Des souris et des hommes. (…) Tout y est à sa place et il n’y a pas un mot de trop[4]. ». En conclusion,  que penser du style? Finalement, avoir du style ne serait-ce pas sortir de l’enfance de l’écriture pour entrer dans son âge adulte ? Et pour vous, qu’est-ce qui caractérise le style ? Comment qualifieriez-vous le style de votre auteur préféré ? Admirez-vous ces auteurs capables de s’exprimer de façon totalement différente selon le genre d’œuvre qu’ils écrivent ? [1] Paul Valery, Œuvres II (1941), éd. Gallimard, Paris, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1960, chap. Rhumbs, p. 636 [2] Racine, Andromaque, Acte 5, scène 5 (Oreste). [3] Gérard Genette, Palimpsestes, la littérature au second degré, éd. Le Seuil, Paris, coll. “Points Essai”, 1982, chap. XIX, p. 142. [4] Maurice Edgar Cointrau, “John Steinbeck, écrivain californien” introduction à Des souris et des hommes,  éd.Gallimard, Paris, coll. Folio, p. 21. ©Pixabay, (CCO) ©Pixabay, (CCO)

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