L'Echangeoir d'Ecriture

Série: conseils et techniques d’écriture

tant de formes de nouvelle...

Lire des nouvelles: petite bibliographie pour s’inspirer, se faire plaisir.

Nos conseils d’écriture vous ont donné envie de lire des nouvelles ? Ou, sans doute, en aviez déjà envie ? Voici la petite bibliothèque de nouvelles de L’Echangeoir d’écriture (Bien sûr, elle est encore en construction, donc, non exhaustive) Lorsque c’est possible, je vous ai mis les liens pour lire directement la nouvelle sur le web, mais bien sûr, n’en n’oubliez pas les librairies ! Et, si vous vous posez la question, les titres en italiques sont des titres de recueil, ceux entre guillemets, sont les titres de nouvelles indépendantes. Pour vous retrouver voici la table des matières : Lire des nouvelles, nos coups de cœurs Découvrir les nouvelles classiques Le foisonnement du XIXème et début XXème Nouvelles contemporaines. Lire des nouvelles, nos coups de cœurs A découvrir en priorité: Maupassant, « La parure », « Une vendetta », « La dot », « Un lâche ». Difficile de choisir. J’aime particulièrement les deux premières pour leur ingéniosité et la violence de la chute, la troisième pour l’opposition entre candeur et cruauté et la dernière pour l’extraordinaire montée en puissance du thème. Maupassant reste un maître, quel que soit ce que vous écrivez. Stephen Zweig, Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme, Lettre d’une inconnue, la confusion des sentiments, La collection invisible, Les prodiges de la vie. http://beq.ebooksgratuits.com/classiques/Zweig-femme.pdf.  Bon, vous l’aurez compris j’ai encore du mal à choisir… J’aime chez Zweig son élégance d’écriture, sa délicatesse pour traiter tous les sujets et en même temps sa capacité à dire, exactement et avec humanisme les sentiments humains. Vingt-quatre heures… est sans doute le texte le plus connu et peut-être l’un des plus marquants mais les autres sont aussi profonds et impressionnants. Anton Tchekhov,  Les meilleures nouvelles de Tchekhov, un recueil pour comprendre l’importance de Tchekhov dans l’évolution de la nouvelle. De nouvelles traduction et une présentation soignée à découvrir avec les éditions Rue Saint Ambroise. Dino Buzzati, « Le K » dans le recueil de nouvelles éponyme. http://www.botgeo.be/textes/Le_k_buzzatti.pdf Je vous en ai déjà parlé, j’adore cette nouvelle, c’est pour moi l’un des meilleurs exemples de nouvelle à chute. Une histoire de marin, destin et d’aventure. Horacio Quiroga : « L’oreiller de plume » paru en France dans le recueil du même nom. Une montée de l’angoisse et des questions, qui redescend brusquement tout en nous laissant une pointe d’interrogation. « L’oreiller de plume » est une des nouvelles les plus connues, mais elles valent toutes le détour, en particulier « Anaconda ». Patrice Franceschi Première personne du singulier. Quatre nouvelles qui parlent du destin et des décisions personnelles. Des personnages présentés aux carrefours de leur vie, avec une dignité, une élégance et vision éthique qui donne une dimension supplémentaire au très grand plaisir de lecture. Un de mes plus grands coups de cœur de ces dernières années. Oscar Wilde, Le fantôme de Canterville. Parce que ça fait du bien de rire, parce que l’histoire est géniale, que la parodie, l’humour et l’ironie sont élevées à la hauteur d’œuvre d’art, parce que ça finit bien et que ce n’est pas banal pour autant. A lire pour le plaisir et pour apprendre à bien écrire des œuvres gaies et profondes (ça n’arrive pas si souvent). Nos autres coups de coeur Ambroise Bierce, « Huile de chien », extrait de Le club des parenticides http://editions.sillage.free.fr/pdf/bierce-clubdesparenticides.pdf Comme le dit le titre, il s’agit toujours pour le protagoniste de se débarrasser de ses géniteurs, de préférence de la façon la plus bizarre possible. Ironie, humour noir, élégance de la langue, des histoires horribles et qui font pourtant sourire. Stevenson, Le cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde. Qui n’en n’a pas entendu parler ? Cette nouvelle reste un modèle, de plaisir de lecture, de construction, d’originalité, de style.  https://beq.ebooksgratuits.com/vents/Stevenson-docteur-Varlet.pdf Alice Munro : « Le goût du goémon », « Mme Cross et Mme Kidd » extrait de Les lunes de Jupiter. Difficile de choisir dans les douze nouvelles qui composent Les lunes de Jupiter, sans aucun doute un chef d’œuvre d’écriture réaliste et féminine. Alice Munro ne cherche ni l’extraordinaire ni le rêve, mais elle nous découvre dans quelques instants de vie des significations à l’existence. Laurent Gaudé  « Sang négrier » extrait de La Nuit Mozambique. Un capitaine de vaisseau négrier dont la vie est bouleversée par la fuite d’un groupe d’esclaves. Un réflexion sur la violence, la peur et la vengeance. Manuel Chaves Nogales : À feu et à sang : héros, brutes et martyrs d’Espagne. Tout est intéressant de ce court recueil qui offre une vision directe, réaliste et sans manichéisme de la guerre d’Espagne, mais qui pourrait parler de n’importe quelle guerre actuelle. Un maître de la nouvelle engagée et réaliste. Découvrir les nouvelles « classiques » Boccace, Le Décameron Marguerite de Navarre, L’Heptameron Cervantès, Les nouvelles exemplaires Parmi le foisonnement des nouvelles du XIXème et du début XXème Maupassant : tout ! (ou presque) Edgar Allan Poe : “l’assassin de la rue Morgue”, La chute de la maison Uscher, et tout le reste Nikolaï Gogol, “Le journal d’un fou”, “le Nez” (Nouvelles de Petersbourg) Anton Tchekhov, « La dame au petit chien », « la tristesse ». Prosper Mérimée, La Venus d’Ille, Colomba, Carmen Horacio Quiroga, Contes d’amour, de folie et de mort, Anaconda, L’oreiller de plume José Luis Borges, L’Aleph, Fictions et surtout « L’Autre », « Pierre Ménard auteur du Quichotte », « Le sud ». Henry James : « Le tour d’écrou », « L’image dans le tapis », « Les papiers d’Aspern », Francis Scott Fitzgerald, « L’étrange histoire de Benjamin Button », « Un diamant gros comme le Ritz », « Les enfants du jazz ». Katherine Mansfield « La garden partie » « La maison de poupée » Marcel Aymé , Le vin de Paris, les contes du chat perchés. Karen Blixen, Sept contes gothiques, Derniers contes, «  le festin de Babette » D . Hammett L’agent de la continentale Lovecraft, « La maison de la sorcière », « celui qui chuchotait dans les ténèbres » (Horreur) Frantz Kafka, « La métamorphose » Roald Dahl, La grande entourloupe Juan Rulfo, Le llano en flammes. Ernest Hemingway, Les neiges du Kilimandjaro Virginia Woolf, Rêves de femmes. Raymond Carver, Parlez-moi d’amour, Les feux. Les nouvelles contemporaines Julio Cortázar, Nouvelles, histoires et autres contes  et plus précisément : « Maison occupée », « La lointaine » ou encore « Continuité des parcs » et « La porte condamnée ». Silvana Ocampo, Faits divers de la terre et du ciel Augusto Monterroso : Œuvre

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Nouvelle à chute, nouvelle instant, nouvelle expérimentale… découvrez nos outils d’écriture

Conseils pour la nouvelle, suite ! Découvrez quelques outils d’écriture pour vous lancer dans les formes spécifiques comme la nouvelle à chute, la nouvelle-instant et la nouvelle d’expérimentation.   L’article est un peu long, n’hésitez pas à aller voir directement les outils d’écriture qui vous intéressent : Pour la nouvelle à chute La nouvelle instant La nouvelle expérimentale Outils d’écriture pour la nouvelle à chute Plus que dans les autres formes de nouvelle, la fin de la nouvelle à chute doit être anticipée depuis le début. Si vous voulez surprendre votre lecteur, vous devez préparer votre surprise dès les premiers mots, mieux dès le titre. Pour cela, vous devez savoir quoi dire pour lancer votre lecteur sur des fausses pistes, quoi taire pour qu’il n’évente pas le secret, quoi annoncer petit à petit pour que la chute ne semble pas non plus invraisemblable. Voici quelques idées pour créer une chute réussie : Prévoir une fin qui soit l’inverse du début : Dans Le K de Dino Buzzati, le monstre des mers est présenté tout au long du récit comme une horrible menace qui pèse sur le personnage. Pourtant, la confrontation finale le révèle comme la chance à jamais ratée du protagoniste. Terminer sur une phrase qui « claque » ou qui étonne : C’est ce que fait Ruffin, par exemple, dans Le refuge del Pietro. Tout au long de la nouvelle, le narrateur parle de la fantastique randonnée vers ce refuge qui devait célébrer son retour à la montagne. Mais il termine sa narration, de plus en plus atroce, en disant que ce refuge n’existe plus … depuis plus de 18 ans. Créer une révélation inattendue : Dans L’oreiller de plume (Quiroga), une jeune mariée souffre d’une maladie inexpliquée… La fin offre une explication totalement inattendue, mais elle  est annoncée par le titre. Serez-vous capable de deviner ? Glisser d’un univers à un autre : Partez du réel pour arriver dans le merveilleux ou le fantastique… ou l’inverse. C’est la technique classique du rêve avec une fin sur le réveil du protagoniste. Bien sûr, elle peut être adaptée à de nombreuses autres situations (changement de personnages, de lieu, de réalité, de monde…). Rester dans le flou : Optez pour une fin ouverte qui permet plusieurs interprétations ou laisse au lecteur la possibilité de fermer l’histoire à sa guise. Clore de façon définitive : Beaucoup de nouvelles se terminent en annonçant la mort du protagoniste. Attention cependant,  à ne pas trop en faire, c’est l’incertitude qui marque le lecteur. Pensez à Les naufragés (Ruffin) , Le Horla… Heureusement, il ne s’est pas rendu compte, pendant que nous déménagions, que j’avais gardé un de ses revolvers. Quand il passera me chercher, à huit heures, il sera trop tard.  (Les naufragés, J.C Ruffin).   Outils d’écriture pour la nouvelle instant La nouvelle instant peut exiger plus de technicité au moment d’écrire. Elle demande aussi une capacité à générer l’attention du lecteur autrement que par l’action. Elle nécessite donc la maîtrise d’outils d’écriture particuliers, mais sa pratique est aussi extrêmement enrichissante. Voici deux techniques de travail possibles (parmi d’autres). L’instant symbolique Choisissez un moment de la vie quotidienne mais qui peut devenir symbolique, par exemple, le premier café du matin comme représentation du renouveau. Bon, c’est vraiment un exemple bas de gamme, le mieux c’est d’aller voir chez Philippe Delerm. Sortez-en tous les détails et choisissez les éléments les plus représentatifs à conserver. Ensuite, commencez à décrire ce moment, en alternant le symbolique et le descriptif. Pensez aussi à travailler le style pour être le plus poétique possible, sans en faire trop. La nouvelle instant est souvent plus réussie quand elle est minimaliste, donc n’hésitez pas à couper, simplifier. le souvenir exploré S’il s’agit d’explorer un moment, vous pouvez choisir un souvenir que vous mettez en relation avec une sensation : vue, odeur, toucher… Vous commencez par développer le souvenir pour en faire une petite narration. Faites attention à ne pas perdre de vue le sens auquel le souvenir est lié. Puis, intégrez-le dans un récit cadre, dans lequel le narrateur rencontre la sensation qui le ramène au souvenir (comme pour la madeleine de Proust, pour rester dans le très connu). Vous aurez alors une nouvelle qui déploiera le souvenir lié à la sensation d’un moment. Expérimenter : La nouvelle est un support fantastique pour expérimenter des nouveaux thèmes ainsi que des outils d’écriture. Cela nous fait sortir de nos habitudes, découvrir de nouveaux horizons. Souvent, on peut aussi trouver des solutions à des problèmes rencontrés antérieurement. En plus des formes que nous venons de présenter, voici quelques exemples d’outils d’écriture pour expérimenter avec la nouvelle : Des tests formels : Ecrivez un texte, puis testez-le avec un autre narrateur (tu au lieu de il, comme dans La Maladie de Sachs par exemple).Changez aussi le point de vue. Créez, par exemple,  un personnage témoin qui voit et raconte depuis son point de vue, comme Watson dans Sherlock Holmes. Changez les temps et pourquoi pas, mélangez-les. Qu’est-ce que ça fait, de passer une partie au présent et de garder l’autre au passé? Quel est l’effet ? Utilisez l’ « écriture blanche » sans émotion. Ensuite tentez la parodie, ou le lyrisme… Essayez aussi différentes longueurs de textes et de phrases. Imposez-vous des phrases très courtes ou alors écrivez tout en une seule phrase… Enlevez toute la ponctuation et remettez-la différemment. Prenez une page blanche et réécrivez un paragraphe sur deux, sans vous relire et voyez ce que cela transforme. Interdisez-vous les adjectifs ou une certaine sonorité ou alors imposez-vous en une… Les idées sont multiples, elles vous apprendront toutes quelque chose. Des contraintes extérieures : Utilisez des images, des mots ou des citations que vous tirez au sort et que vous vous obligerez à placer dans un texte. Choisissez une musique (sans parole) et écrivez un texte qui colle à cette musique ou à une forme musicale (jazz, symphonie, chanson…). N’hésitez pas à consulter les livres ou les sites d’atelier d’écriture, vous trouverez des milliers d’idées ! Des possibilités hors habitude d’écriture : Reprenez l’un de vos textes et réécrivez-le dans un genre que vous n’avez jamais tenté : du fantastique si

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Conseils avant de se lancer

4 conseils pour écrire une nouvelle

Nous voici enfin arrivés au moment-clé ! Mais avant de découvrir ces 4 conseils pour écrire une nouvelle, attaquons-nous au grand problème. Qu’apporte l’écriture de la nouvelle ? Et à quoi doit-on penser lorsque l’on veut écrire une nouvelle ? La nouvelle est un genre très sophistiqué, qui réclame des lecteurs cultivés, des gens qui ne confondent pas la quantité avec la qualité. Clara Obligado, nouvelliste argentine[1]. Écrire des nouvelles, est-ce que ça en vaut la peine ? La nouvelle n’est pas un genre à la mode. Même si les concours de nouvelles sont nombreux, il est rare que les textes des nominés arrivent au grand public. Certains se demandent peut-être si cela vaut la peine d’y consacrer du temps au lieu de se lancer dans des projets plus éditables. Pourtant, la nouvelle est un exercice extrêmement formateur et un formidable champ d’expérimentation. Si vous hésitez encore, voici quelques arguments en faveur de la nouvelle. C’est un format court : donc on peut s’y consacrer sans désespérer du temps passé. Parce qu’elle est courte, elle peut facilement être remaniée, retravaillée sans que l’on soit effrayé du travail à (re) faire. Parce qu’elle n’est pas très commerciale, c’est un champ d’expérimentation littéraire plus libre. C’est un type d’écriture qui demande une très grande concision, donc qui apprend beaucoup. Il existe beaucoup de concours de nouvelles et quelques très bonnes maisons d’éditions qui en publient. Pour ceux qui visent la publication, elles restent donc une possibilité de se faire connaître. En résumé, la nouvelle est le genre idéal pour apprendre ou perfectionner l’art de l’écriture. Je propose de partager avec vous quelques conseils pour écrire une nouvelle, glanés chez les auteurs, les éditeurs, les critiques et aussi un peu dans ma pratique personnelle. A l’origine, je ne voulais faire qu’un seul article sur ce sujet, mais ce serait trop long, alors je vous propose aujourd’hui les conseils généraux et après-demain les trucs et méthodes pour les formes spécifiques (nouvelles à chute, nouvelle instant…) 2 conseils pour écrire une nouvelle d’ordre général : Lire, lire mais lire en écrivain Ça, c’est un conseil ultra général, mais il reste fondamental. Imprégnez-vous des meilleurs auteurs de nouvelles. Lisez pour le plaisir. Lisez pour l’écriture. Laissez-vous porter par les histoires tout en prenant des notes. Notez ce qui vous a plu et aussi ce qui vous a déplu. Ce que vous aimeriez imiter, ce que vous ne voudriez surtout pas faire. Ce que vous aimeriez transformer, faire vôtre, subvertir, réutiliser. C’est ainsi que vous forgerez votre pensée, votre langue et tous vos instruments d’écriture. C’est ainsi que vous trouverez votre style. (Et si vous manquez de référence, la semaine prochaine, je vous transmettrai une bibliographie exclusivement consacrée à la nouvelle) S’approprier la forme Mais lire ne suffit pas. Voici quelques conseils de travail qui peuvent servir aux auteurs débutants comme aux plus confirmés. Si vous avez bien suivi les articles précédents (et oui, il y a une logique !) ils ne devraient pas vous surprendre. Petit vade-mecum à l’usage des pressés : la base des conseils pour écrire une nouvelle Ne partez pas dans tous les sens, restez sur une idée et approfondissez-là au maximum. Ayez à l’esprit une intrigue claire et efficace. Centrez-vous sur le plus petit nombre possible de personnages. Prévoyez la fin avant de commencer à écrire. Coupez tout ce qui n’est pas strictement nécessaire à l’avancée de l’intrigue. Expérimentez : tentez de nouvelles formes, de nouveaux genres, lancez-vous des défis ! Deux savoir-faire incontournables : Prévoir l’effet Que vous écriviez en vous laissant porter par votre inspiration ou que vous commenciez par faire un plan, si vous vous lancez dans l’écriture d’une nouvelle, à un moment ou à un autre, il faut vous arrêter et réfléchir à ce que vous écrivez. Vous devez avoir une vision globale de ce que vous voulez réaliser, de l’effet que vous voulez produire sur le lecteur. Soyez capable de répondre à une question du style : qu’est-ce que mon histoire doit transmettre au lecteur ? Une fois que vous avez la réponse, faites-en la prémisse de votre récit et plus encore, faites en sorte que tout le récit, de la première à la dernière phrase ait pour but de faire fonctionner cette prémisse, de générer cet effet sur le lecteur. L’artiste, s’il est habile, n’accommodera pas ses pensées aux incidents, mais, ayant conçu délibérément, à loisir, un effet à produire, inventera les incidents, combinera les événements les plus propres à amener l’effet voulu. Si la première phrase n’est pas écrite en vue de préparer cette impression finale, l’œuvre est manquée dès le début. Baudelaire, Notes nouvelles sur Edgar Poe  Travailler la concision Parce qu’elle est courte, la nouvelle est le lieu de la concision. Tous les auteurs l’ont dit à un moment ou à un autre, il faut savoir choisir, ne pas trop dire. Alors n’hésitez pas à couper, à ciseler, à inciser. Comptez sur les silences, les non-dits : les lecteurs sont intelligents et leur inconscient remplira les blancs. Vous devez arriver à une unité et une clarté d’intrigue qui créera une tension interne et pour cela chacun de vos mots doit servir votre but de narration. Mais bon, n’oubliez pas non plus de faire une relecture pour vérifier que votre récit reste compréhensible ! L’unité d’impression, la totalité d’effet est un avantage immense qui peut donner à ce genre de composition une supériorité tout à fait particulière, à ce point qu’une nouvelle trop courte (c’est sans doute un défaut) vaut encore mieux qu’une nouvelle trop longue. Dans la composition tout entière il ne doit pas se glisser un seul mot qui ne soit une intention, qui ne tende, directement ou indirectement, à parfaire le dessein prémédité.   Baudelaire, Notes nouvelles sur Edgar Poe. Si vous gardez cela à l’esprit, vous avez les principaux ingrédients pour vous lancer dans l’écriture de la nouvelle. Et pour ce qui est des formes particulières (nouvelle à chute, nouvelle instant, nouvelle expérimentale…) rendez-vous jeudi. Vous pourrez découvrir quelques techniques et conseils plus spécifiques. [1]Clara Obligado, interview donnée à El

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Formats, types et sous-genre : les différentes formes de la nouvelle

Si, après presque huit siècles d’existence, il y a toujours des doutes lorsqu’il s’agit de définir la nouvelle, c’est peut-être parce qu’elle peut revêtir des formes diverses et s’intégrer dans presque tous les genres romanesques. Voici un petit tour des formes à tester, appliquer ou subvertir. Différentes formes : La nouvelle histoire : C’est le format le plus classique. Un narrateur raconte une histoire avec un début, un (des) événement(s) perturbateur(s), des actions en découlant, et un dénouement (ouvert ou fermé). Chacune de ces étapes peut être placée là où vous voulez, du moment que cela crée l’effet recherché : suspens ou réflexion, émotion ou conviction… à vous de jouer ! La nouvelle instant Ce n’est plus l’évolution d’une histoire mais l’exploration par l’écriture d’un moment précis. Le temps réel de lecture est supérieur au temps « véritable » de l’action. Ce sont donc des sensations, des émotions, une atmosphère qui sont mis en avant. L’auteur le plus connu est sans doute Raymond Carver. En littérature francophone, on citera plutôt Annie Saumont, Olivier Adam ou Danièle Sallenave. Personnellement, j’ai un petit faible pour La première gorgée de bière et autres plaisirs délicats » (Philippe Delerme). La micro-fiction D’une ligne à une page, la micro-fiction raconte une anecdote signifiante en un minimum de mots. L’un des précurseurs est Felix Fénéon avec sa « nouvelle en trois lignes » inspirée de la rédaction des faits divers. Pour les amateurs du genre, il y a aussi Augusto Monterroso. A noter que la fameuse « A vendre, chaussures de bébé, jamais portées » attribuée à Hemingway est certainement apocryphe. Avec le succès de twitter, c’est un genre en plein renouveau. La nouvelle à chute Comme nous l’avons déjà dit, la chute n’est pas obligatoire. C’est juste une forme particulière dont le but est de surprendre par une fin inattendue tout en restant crédible. De toute façon, c’est un bel exercice d’écriture, n’hésitez pas à tester ! Encadrée ou pas Une nouvelle peut fonctionner de façon autonome. Mais elles sont souvent rassemblées en recueil. Parfois, elles sont intégrées dans un récit cadre. C’est d’ailleurs sous cette forme qu’est apparu le premier recueil de nouvelles. Pendant longtemps, ces récits cadres sont restés sur un modèle unique, celui de la réunion de personnages occupés à se raconter des histoires. Puis, l’italien Italo Calvino a su ouvrir les possibilités (Le château des destins croisés, Les villes invisibles …). Sans aucun doute, il y a là des pistes d’écriture à creuser. Tous les genres sont possibles : Comme le roman, la nouvelle est adaptable à l’infini. C’est le réalisme et le fantastique qui dominent mais on trouve aussi la nouvelle satirique, policière, historique… Pour la science-fiction et la fantasy, c’est plus compliqué parce que la brièveté de la nouvelle rend difficile la mise en place d’un univers complexe. Pourtant, qui dit difficile ne dit pas impossible : Philip K Dick en est l’un des meilleurs exemples.             Quelques mots sur les formes les plus courantes : La nouvelle réaliste : elle évoque des faits contemporains, porte un regard sur la société. De Boccace à Alice Munro, en passant par Maupassant, Zweig, Ruffin, la nouvelle a plus que prouvé sa capacité à explorer le présent. La nouvelle fantastique : le propre du fantastique (qui n’est pas la science-fiction) c’est de laisser planer le doute sur la réalité des faits évoqués. Est-ce vrai ? Est-ce le fait de l’imagination / la santé mentale du narrateur ? Gogol, Maupassant (encore lui !) Borges, Buzzati, Cortazar… de quoi chambouler votre vision du monde. La nouvelle policière : pratiquement tous les auteurs de romans policiers y ont eu recours à un moment ou un autre. Citons, entre autres, Agatha Christie, Simenon, Irisch ou plus récemment Fred Vargas. En résumé, quel que soit votre style, votre genre préféré, vos goûts de narration, vous trouverez votre bonheur d’écriture et/ou de lecture dans la nouvelle. Et pour mieux se lancer dans les travaux pratiques, ne manquez pas notre prochain article : Conseils pratiques pour l’écriture de la nouvelle.        

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histoire de la nouvelle

Comment est née la nouvelle ? Petite histoire d’un genre mal connu.

Découvrir l’histoire de la nouvelle, c’est explorer des possibilités d’écriture, c’est découvrir des modèles et contre-modèles pour savoir trouver –ou créer- la forme qui conviendra le mieux à votre projet. Du XIV au XIXème siècle (histoire de la nouvelle racontée avec des bottes de Sept lieues !)             Naissance et « enfance » de la nouvelle La nouvelle est plus ancienne que le roman, puisque l’on dit que le roman nait avec Don Quichotte (1605 et 1615), alors que les premières nouvelles sont apparues avec le Décaméron de Boccace (1349-1353) ! Le texte présente un groupe de jeunes gens qui, pour fuir la peste, se retrouvent à la campagne et font taire l’ennui en se racontant des histoires qui vont de l’érotique jusqu’au tragique, en passant par toute la gamme des écrits amoureux. La nouvelle fait ensuite la conquête de l’Espagne grâce à Cervantès (Les nouvelles exemplaires) et de la France par l’entremise de Margueritte de Navarre (Héptameron). Originalité et parti-pris La particularité de la nouvelle, dès son origine, est le regard qu’elle porte sur le monde. Au contraire des premiers romans ou du théâtre, les auteurs s’en servent pour décrire des événements contemporains ou des  faits de société.  La perception du monde diffère selon les auteurs et les pays. Plutôt grivoise en Italie, elle tend vers le grave en Espagne et oscille entre ces deux extrêmes en France. Cependant, la nouvelle ne se borne pas au réalisme. Le merveilleux est souvent considéré comme une autre facette de la réalité, ce qui ouvre de multiples possibilités d’écriture.             Le XIXème siècle, un nouvel âge d’or de la nouvelle. La multiplication des journaux augmente la demande de nouvelles. En effet, les périodiques commandaient régulièrement des textes aux écrivains reconnus. C’est ainsi, par exemple, que Maupassant publiait ses nouvelles. Au XIXème siècle, le réalisme domine toujours. Nombre de nouvelles portent sur l’observation d’un milieu ou explorent la banalité de la vie. Mais, à l’opposé du roman, elles ne comportent pas de digressions et leur dissection de la réalité est  incarnée dans des intrigues serrées et émotionnellement fortes. Cela les rend, à mon avis, plus agréables à lire. Comment dire plus efficacement que dans La parure les aspirations au luxe de la petite bourgeoisie? Comment critiquer plus durement que dans Boule de Suif, la masse veule des bien-pensants ? La nouvelle va aussi répondre à la mode de l’exotisme avec des récits examinant la vie dans des contrées « plus reculées ». Mérimée avec Colomba ou Maupassant avec l’horrible Une vendetta vont ainsi s’attacher à présenter « l’âme » de la Corse. Par ailleurs, la nouvelle allemande a ouvert la porte à l’exploration de l’intériorité tandis que la vulgarisation de la psychanalyse, le goût pour le mystérieux vont favoriser l’apparition des thèmes de la folie, du merveilleux, du fantastique. Malheureusement, la multiplication des parutions dans les journaux va quelque peu décrédibiliser la nouvelle.  Dès la fin du XIX, elle est perçue comme moins soignée que le roman.             XXème siècle et époque contemporaine : Même si de grands auteurs (Camus, Sartre, Aymé, Yourcenar …) ont écrit des nouvelles, en France, elle est devenue un genre mineure. Ailleurs, pourtant, elle reste foisonnante et  riche. L’Amérique Latine a vu se développer des auteurs majeurs dont l’œuvre est centrée autour de la nouvelle (surtout fantastique et méta-littéraire) : Borges, Cortázar, Bioy Casares, Ocampo, Quiroga, Benedetti… Ils ont écrit des nouvelles qui sont de véritables chefs d’œuvre.  Dans le monde anglo-saxon, la nouvelle a également trouvé des lettres de noblesse. Carver, Hemingway et tant d’autres ont transformé, régénéré formes et fonds. Dernièrement, la canadienne Alice Munroe a reçu le prix Nobel de littérature pour son œuvre uniquement composée de nouvelles. Alors l’aspirant auteur francophone peut-il encore se dédier à l’écriture de nouvelles ? Bien sûr ! Même si la nouvelle est moins porteuse que le roman, il y a encore (ouf) des maisons d’édition qui les acceptent. Et puis, écrire une nouvelle est un exercice incroyablement formateur comme je vous le montrerai dans un prochain article. En attendant, rendez-vous la semaine prochaine pour explorer les différentes formes de nouvelles (réaliste, fantastique, instant… il y en aura pour tous les goûts !) Vous pouvez consulter les articles précédents sur la nouvelle : ICI © Pixabay, C00 © Pixabay, C00

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Qu’est-ce qu’une nouvelle ? Pourquoi et comment en écrire

Une série sur la nouvelle : Qu’est-ce qu’une nouvelle, comment écrit-on une nouvelle ou encore, comment trouver une chute ? Voilà des questions qui reviennent souvent, que ce soit dans les ateliers ou sur internet. J’y ajouterai « pourquoi écrire des nouvelles » ? Est-ce parce qu’elles font l’objet de nombreux concours ?

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Avoir du style: ce que c’est et ce que ce n’est pas (2/2)

           Après avoir déblayé la question du style en définissant ce qu’il n’était pas, il est temps de préciser ce que serait « avoir un style littéraire ». Nous avions noté qu’il s’agissait de s’adapter au sens. Plus en détail, on pourrait lister un certain nombre d’éléments « faisant style » : Quelques outils pour gérer son style. Une question de musicalité :  « Le poème – cette hésitation prolongée entre le son et le sens[1] ». Chaque langue offre suffisamment de choix pour nous permettre de combiner les mots selon leur sens et leur sonorité. On ne peut pas toujours arriver au fameux sifflement créé dans la réplique d’Oreste : « pour qui sont ses serpents qui sifflent sur vos têtes[2] ». Il ne serait d’ailleurs pas judicieux de le rechercher à tout prix. Pourtant, bien choisies, les assonances (répétition d’une voyelle) et les allitérations (répétition d’une consonne) viennent renforcer nos textes, créant selon les choix, douceurs, violence, dureté. Une question de rythme : Rien n’est plus ennuyeux que d’entendre des phrases qui semblent toutes faites sur le même modèle. C’est lancinant, monotone et endormant. Donc, variez. Mélangez du long et du court, des juxtapositions et des subordinations et pourquoi pas, quelques coordinations. Adaptez à ce que vous racontez. Ainsi, n’hésitez pas à chercher différentes bandes-son pour accompagner chaque partie de votre texte. Ensuite, analysez leur rythme, voyez comment vous pouvez vous en inspirer pour combiner vos phrases. Une question d’image : Certes, les figures de style nous renvoient à nos cours de lycée. Il ne faut pas les dédaigner pour autant. Éloignés de l’usage commun, elles donnent l’impression d’un sens nouveau et pourtant naturel. Mais les images peuvent être aussi des assemblages de mots ou d’idées, pas forcément répertoriés comme « figure ». L’important est de déclencher l’émotion esthétique chez votre lecteur, par leur pouvoir de suggestions, pour créer une ambiance, une émotion.  Ainsi, bien employées,  images et figures permettront de glisser plus profondément dans votre histoire, en marquant l’inconscient du lecteur. En exemple, voici le premier texte qui m’a marqué de façon littéraire :   Une vision du monde:  « La singularité d’un « nouvel artiste » qu’il se nomme Renoir ou Morand, est toujours dans les rapports nouveaux qu’il sait établir entre les choses. –Non les choses mais leurs rapports[3]. » En effet, ce qui différencie une anecdote d’une fiction littéraire, c’est ce qu’elle révèle de l’existence. C’est pour cela que de nombreux auteurs ont cherché un mode d’expression qui permette de transmettre leur vision du monde. Lorsque c’est réussi, cela parait naturel. Parfois, il a fallu des années de batailles avec le vocabulaire et la syntaxe pour que l’auteur soit satisfait. Encore une fois, il s’agit d’adaptation. Donc, en vous relisant, réfléchissez. Comment vos choix linguistiques, thématiques et structuraux soutiennent-ils ce que vous voulez exprimer ? L’essence de la langue : Le style littéraire c’est aussi la capacité de dire uniquement le nécessaire. Pour cela, l’expérience compte beaucoup comme l’explique le critique Maurice Edgar Cointreau du processus qui amena Steinbeck à écrire l’un de ces chefs d’œuvre : « La perfection de ce roman très bref vient sans doute du fait qu’au cours des années précédents, John Steinbeck avait conjuré ses démons. Son romantisme débridé avait imprégné Cup of Gold ; son panthéisme s’était tari dans To a God unknown, son humour avait explosé ans Tortilla Flat, et sa mystique libertaire lui avait dicté In Dubious Battle. De ces quatre produits soigneusement décantés, ne restait que la quintessence d’où naquit Des souris et des hommes. (…) Tout y est à sa place et il n’y a pas un mot de trop[4]. ». En conclusion,  que penser du style? Finalement, avoir du style ne serait-ce pas sortir de l’enfance de l’écriture pour entrer dans son âge adulte ? Et pour vous, qu’est-ce qui caractérise le style ? Comment qualifieriez-vous le style de votre auteur préféré ? Admirez-vous ces auteurs capables de s’exprimer de façon totalement différente selon le genre d’œuvre qu’ils écrivent ? [1] Paul Valery, Œuvres II (1941), éd. Gallimard, Paris, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1960, chap. Rhumbs, p. 636 [2] Racine, Andromaque, Acte 5, scène 5 (Oreste). [3] Gérard Genette, Palimpsestes, la littérature au second degré, éd. Le Seuil, Paris, coll. “Points Essai”, 1982, chap. XIX, p. 142. [4] Maurice Edgar Cointrau, “John Steinbeck, écrivain californien” introduction à Des souris et des hommes,  éd.Gallimard, Paris, coll. Folio, p. 21. ©Pixabay, (CCO) ©Pixabay, (CCO)

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suricates lecteurs de policier

Les 1001 vies du roman policier (1/2, en ligne droite )

               Parfois un ami ou un collègue vous voit lire un roman policier et remarque sur un ton légèrement supérieur « ah, non, moi vraiment je ne lis pas ce genre de livre… ». Bon, on peut ne pas aimer le suspense, les enquêtes, les crimes… mais sérieusement, la plupart de ces personnes sont victimes d’un simple préjugé : croyant que le roman policier est un genre violent qui ne s’intéresse qu’à la résolution du crime (ce qu’il peut être évidemment), ils ignorent tout l’éventail de style, de ton, de sujet, de regard sur le monde, de renouvellement littéraire et de portée sociale de ce genre pourtant nouveau dans l’Histoire de la littérature.

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